Rennes : la métamorphose ambitieuse de la ZA Nord – Coteaux de l’Ille à l’horizon 2050
SOMMAIRE
- Un territoire stratégique à réinventer
- Un aménagement désuet
- Un constat écologique grinçant
- La réinvention : une lumière au bout du tunnel
- Les objectifs d’un projet de requalification ambitieux
- 1. Réaffirmer l’attractivité économique dans une logique de mutation
- 2. Encourager les mobilités durables et réduire la dépendance à la voiture
- 3. Réconcilier urbanisme et écologie
- 4. Produire de nouveaux logements pour répondre à la pression démographique
- 5. Réinventer un cadre de vie urbain inclusif et résilient
- Trois quartiers pilotes pour incarner la mutation
- Chesnay-Beauregard : un cœur de quartier structuré par le Trambus
- Nouvelle Robiquette : un nouveau visage à l’entrée nord de Rennes
- Donelière / Gros Malhon : ESS, proximité et solidarité au cœur du projet
- Une transformation portée par la concertation et la vision à long terme
- Une concertation structurée en plusieurs temps
- Un projet au long cours, jusqu’en 2050
Longtemps perçue comme un arrière-plan fonctionnel de l’agglomération rennaise, la zone d’activités (ZA) Nord – Coteaux de l’Ille s’apprête à opérer une profonde mue. Située à la croisée des communes de Rennes et de Saint-Grégoire, cette enclave économique de 236 hectares, héritée des logiques urbanistiques des années 1960-70, s’apprête à être intégrée pleinement à la ville. Si elle abrite aujourd’hui une grande diversité d’activités, la zone souffre de nombreux dysfonctionnements.
Face à ce constat, Rennes Métropole a donc engagé une ambitieuse opération de transformation urbaine, pensée comme un projet de requalification à long terme, jusqu’à l’horizon 2050. En ligne de mire : faire de cette entrée nord de la ville un territoire à la fois plus attractif, plus habité, plus écologique et mieux intégré dans le tissu urbain métropolitain.
Porté par une démarche de concertation citoyenne active, ce vaste chantier de transformation urbaine va modifier en profondeur le visage de la ZA Nord. Entre ambition écologique, mixité fonctionnelle et dynamique participative, la métamorphose engagée pourrait bien faire de cette zone historiquement périphérique l’un des nouveaux moteurs urbains de la métropole rennaise.
Un territoire stratégique à réinventer
À première vue, la ZA Nord – Coteaux de l’Ille semble répondre aux attentes classiques d’une zone d’activités périphérique : accessibilité routière, grands linéaires commerciaux, espaces artisanaux, présence de services. Mais sous cette apparente fonctionnalité se cache une réalité plus complexe, marquée par une organisation spatiale datée et des usages peu cohérents.
D’une superficie de 236 hectares, cet espace s’étend sur les communes de Rennes et Saint-Grégoire. En bordure de la rocade nord, la zone est au carrefour d’axes structurants vers Saint-Malo, Brest et le centre-ville rennais. Pourtant, malgré cette position géographique favorable, le secteur souffre d’un isolement urbain croissant et d’un manque de lisibilité.
Un aménagement désuet
Issu des logiques d’aménagement des Trente Glorieuses, le tissu urbain de la ZA Nord reflète une planification héritée d’un autre temps, centrée sur l’automobile et le développement extensif. Le bâti y est largement monofonctionnel, souvent peu dense, et l’urbanisme y demeure très fragmenté : ici un supermarché, là un entrepôt, plus loin quelques maisons pavillonnaires dispersées.
L’ensemble donne l’impression d’un territoire cloisonné, sans véritable centralité, et surtout sans articulation claire entre les différentes fonctions. Le stationnement domine largement le paysage, tout comme les infrastructures routières, au détriment des mobilités douces et de la qualité des espaces publics.
Un constat écologique grinçant
Sur le plan environnemental, le diagnostic est sans appel. La forte imperméabilisation des sols – couplée à une végétalisation marginale – accentue les effets d’îlots de chaleur urbains en période estivale, tandis que les risques d’inondation liés aux débordements de l’Ille sont en augmentation. La canopée, c’est-à-dire la couverture arborée, y est aujourd’hui très limitée. Cela ne correspond pas avec l'objectif zéro artificialisation nette mis en place à l’échelle nationale.
En parallèle, de nombreuses parcelles sont sous-occupées, parfois en friche, et plusieurs bâtiments affichent une faible performance énergétique. Ce constat est d’autant plus préoccupant que la zone se situe en lien direct avec le corridor écologique de la vallée de l’Ille, espace naturel sensible qui peine à dialoguer avec son environnement urbain immédiat.

La réinvention : une lumière au bout du tunnel
Malgré ces faiblesses, la ZA Nord conserve un potentiel considérable de transformation. Elle accueille déjà une diversité d’activités économiques (près de 7 000 emplois recensés), incluant de grandes surfaces commerciales, des acteurs de l’économie sociale et solidaire comme Emmaüs ou Envie 35, et un tissu artisanal toujours actif.
L’enjeu est donc moins de reconstruire ex nihilo que de réorganiser, densifier et diversifier, en mettant en cohérence les différentes fonctions existantes avec les ambitions d’une ville résiliente, sobre et inclusive. À travers cette requalification, la métropole entend valoriser un territoire à la fois productif, habité et écologique, qui pourrait, demain, incarner un nouveau modèle d’entrée de ville.
Les objectifs d’un projet de requalification ambitieux
La transformation de la ZA Nord fait écho à une volonté politique forte de repenser le modèle de développement de cette partie de la métropole rennaise à l’aune des grands défis contemporains : transition écologique, résilience face au changement climatique, relocalisation des activités économiques, qualité de vie urbaine, et mixité fonctionnelle.
À travers ce projet, Rennes Métropole souhaite faire de cette zone historiquement périphérique un véritable quartier de ville à part entière, articulé autour de cinq objectifs majeurs.
1. Réaffirmer l’attractivité économique dans une logique de mutation
Le maintien de l’emploi et le renforcement du tissu économique local sont au cœur du projet. Le but ici est d’accompagner la mutation des activités existantes plutôt que les évincer. Il s’agit notamment de soutenir les acteurs de l’économie sociale et solidaire déjà implantés, de promouvoir les filières émergentes autour du réemploi, de l’écoconstruction ou de l’économie circulaire, et de faciliter en parallèle l’implantation de nouvelles entreprises.
Il faut dépasser le modèle de zone purement commerciale ou logistique pour aller vers un tissu économique mixte, plus en lien avec les enjeux sociaux et environnementaux contemporains.
2. Encourager les mobilités durables et réduire la dépendance à la voiture
Aujourd’hui pensée presque exclusivement autour de l’automobile, la zone devra se doter d’un maillage fin de mobilités alternatives. Le futur passage du Trambus est l’un des leviers structurants de cette recomposition, avec un impact attendu sur la desserte et l’accessibilité du secteur.
À cela s’ajouteront des itinéraires cyclables sécurisés, une meilleure lisibilité des cheminements piétons, et la réorganisation du stationnement pour désenclaver certains îlots. La rue du Chesnay-Beauregard, par exemple, deviendra un axe de mobilité apaisé et végétalisé, à la fois vitrine de la transformation et colonne vertébrale du nouveau quartier.
3. Réconcilier urbanisme et écologie
Le projet poursuit un objectif de renaturation progressive du territoire. Lutter contre les îlots de chaleur, favoriser l’infiltration des eaux grâce à la désimperméabilisation des sols, restaurer la biodiversité locale : autant d’objectifs qui guideront la recomposition des espaces publics et la conception des nouveaux îlots bâtis.
Le corridor écologique de l’Ille, aujourd’hui sous-exploité, sera mieux valorisé et relié aux futures trames vertes. L’ambition affichée est de doubler la couverture arborée d’ici 2050, avec une approche fondée sur les continuités écologiques et la gestion durable des eaux pluviales à ciel ouvert.

4. Produire de nouveaux logements pour répondre à la pression démographique
L’agglomération étant en forte croissance, la production de logements neufs à Rennes est un enjeu central. Le projet prévoit la création de 4 000 à 5 000 logements à moyen et long terme, avec une attention particulière portée à la qualité des formes urbaines et à la mixité sociale. Les futurs quartiers seront pensés comme des environnements résidentiels complets, avec des commerces de proximité, des services, des espaces publics végétalisés et des connexions efficaces aux autres secteurs de la ville.
5. Réinventer un cadre de vie urbain inclusif et résilient
Au-delà des chiffres et des infrastructures, la transformation de la ZA Nord exhibe une volonté forte de créer un cadre de vie où cohabitent les fonctions urbaines : habitat, travail, nature, commerce, culture, lien social. Chaque intervention – qu’il s’agisse d’un espace public, d’un nouveau bâtiment ou d’un axe de circulation – sera pensée dans une logique d’usage, de partage et de sobriété.
La ville de demain, ici, se veut plus douce, plus verte et plus solidaire, avec une attention particulière portée aux publics les plus fragiles et aux usages du quotidien.
Trois quartiers pilotes pour incarner la mutation
Pour rendre concrète et progressive la transformation de la ZA Nord – Coteaux de l’Ille, Rennes Métropole a identifié trois secteurs pilotes où seront expérimentées les premières opérations de requalification : Chesnay-Beauregard, Nouvelle Robiquette et Donelière / Gros Malhon.
Ces trois espaces, aux profils et enjeux distincts, concentreront les premières traductions opérationnelles du projet global : recomposition urbaine, mixité fonctionnelle, renaturation et réintroduction de l’habitat.
Chesnay-Beauregard : un cœur de quartier structuré par le Trambus
Situé dans la partie est du périmètre, le secteur de Chesnay-Beauregard jouit d’un positionnement stratégique, à la jonction entre la zone d’activités et les quartiers résidentiels existants. L’arrivée du Trambus, qui longera la rue du Chesnay-Beauregard, constitue l’élément déclencheur de la requalification.
Cette rue, aujourd’hui très routière, sera profondément transformée : végétalisation, apaisement de la circulation, introduction de nouveaux commerces de proximité et aménagements pour les mobilités actives (pistes cyclables, trottoirs élargis).
Ce futur boulevard urbain viendra structurer un véritable cœur de quartier :
- En densifiant modérément le secteur avec l’arrivée de logements en étage,
- En préservant les activités économiques installées en arrière de l’axe, notamment les zones artisanales.
La logique retenue n’est donc pas celle du remplacement, mais celle de la cohabitation progressive entre ville productive et ville habitée.

Nouvelle Robiquette : un nouveau visage à l’entrée nord de Rennes
Plus au nord, à l’entrée de la métropole depuis la voie express de Saint-Malo, le secteur de la Nouvelle Robiquette sert d'interface entre Rennes et Saint-Grégoire. Aujourd’hui dominé par des infrastructures routières, des parkings et des surfaces commerciales vieillissantes, cet espace sera complètement repensé et remis au goût du jour pour offrir une véritable façade urbaine à la ville.
Le projet prévoit notamment la création d’un front bâti résidentiel, en lien direct avec des espaces naturels existants comme la vallée de l’Ille, pour renforcer la trame paysagère du secteur. Une mutation progressive des activités commerciales est envisagée, avec la transformation de certains fonciers en logements, services ou lieux d’activités économiques à plus forte valeur ajoutée. Ce quartier sera également un point d’appui important pour les liens cyclables entre la ZA Nord et le centre-ville.
Donelière / Gros Malhon : ESS, proximité et solidarité au cœur du projet
À l’ouest du périmètre, le secteur Donelière / Gros Malhon incarne quant à lui la dimension sociale et solidaire du projet. Marqué par la présence de structures emblématiques de l’économie sociale et solidaire – Emmaüs, Envie 35, La Belle Déchette – ce quartier est un foyer d’initiatives locales et de démarches de réemploi. Rennes Métropole entend valoriser cette identité, en confortant ces activités et en favorisant leur rayonnement.
La requalification de l’avenue Gros Malhon prévoit la création d’un mail paysager, articulant habitat, espaces publics qualitatifs et nouvelles polarités commerciales. L’introduction de logements abordables, de services de proximité et d’équipements partagés (ateliers, espaces associatifs, tiers-lieux) ancrera le secteur dans une dynamique de quartier populaire, durable et inclusif. Ce territoire, longtemps relégué en marge, pourrait ainsi devenir un véritable laboratoire de la ville solidaire de demain.
Une transformation portée par la concertation et la vision à long terme
La requalification de la ZA Nord s’appuie également sur une démarche de concertation active, engagée dès la phase de diagnostic et destinée à se poursuivre tout au long du processus. Dans un contexte où les grands projets urbains sont souvent contestés pour leur manque de transparence ou leur déconnexion des besoins locaux, Rennes Métropole fait ici le pari d’une transformation co-construite, au plus près des usagers, habitants et acteurs économiques du territoire.
Une concertation structurée en plusieurs temps
Depuis 2022, des ateliers publics, rencontres avec les acteurs de terrain, marches exploratoires, et enquêtes de perception ont été organisés pour recueillir les attentes, les craintes et les idées des citoyens. C'est comme cela que la métropole prévoit d’enrichir le diagnostic urbain initial, en intégrant les récits d’usage, les vécus quotidiens et les aspirations des personnes concernées par la zone.
Elle a aussi mis en lumière les contradictions et les arbitrages à opérer : comment maintenir des activités économiques tout en densifiant l’habitat ? Comment améliorer la qualité de vie sans exclure les structures existantes ? Comment aménager sans gentrifier ?
Un panel citoyen, représentatif de la diversité du territoire, a également été mis en place pour approfondir certains axes du projet, en lien avec les enjeux environnementaux et sociaux.

"Nous avons besoin de tous les avis, de l’expertise des acteurs, comme des usagers de ce secteur, pour construire un avenir à la fois durable et dynamique pour la Zone d’Activités Nord Coteaux de l’Ille."
Nathalie Appéré, Présidente de Rennes Métropole
Un projet au long cours, jusqu’en 2050
La transformation de la ZA Nord est un projet de taille, il est donc évident qu’il soit développé sur une trajectoire de temps long, pensée jusqu’à l’horizon 2050. Il ne s’agit pas d’une opération d’aménagement figée, mais bien d’un projet évolutif, qui s’adaptera aux mutations économiques, sociales et climatiques des prochaines décennies. La complexité du site est l’un des facteurs qui expliquent une telle durée : diversité des propriétaires fonciers, multiplicité des usages, contraintes techniques, ou encore régulation des risques naturels.
La mise en œuvre sera donc progressive, par phases successives, en commençant par les trois quartiers pilotes identifiés. Les premières opérations concrètes sont attendues à court terme, notamment autour du Trambus et de la requalification de la rue du Chesnay-Beauregard, avant une généralisation des principes de transformation sur l’ensemble du périmètre. Un plan-guide et des outils de maîtrise foncière accompagneront cette évolution, en tenant compte des enjeux de sobriété, d’équité territoriale et de résilience urbaine.
La dernière réunion publique s’est tenue en janvier 2025, et la restitution de la concertation devrait être effectuée dans les prochaines semaines. La mise à disposition de l’étude d’impact se fera à l’été 2025, et l'approbation finale du dossier de création de la ZAC est prévue pour l’automne.
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