La transition écologique dans l’immobilier de l’État : enjeux, actions et réalisations
SOMMAIRE
- Les trois grands leviers de transformation
- L'enjeu de sobriété immobilière
- Les usages et l’exploitation-maintenance
- Les mesures de réduction de consommation
- L’unité d’élite “exploitation maintenance” pour la sobriété énergétique
- Agir par des travaux de rénovation
- Quelques réalisations concrètes pour la transition écologique dans l’immobilier d’État
- Les rénovations lourdes du programme 348
- Gains énergétiques rapides
- Initiatives menées dans le cadre du concours CUBE
Le secteur du bâtiment se trouve au cœur des enjeux de réduction des émissions de gaz à effet de serre en France, représentant à lui seul près d’un quart du total national. Alors que la construction de programmes de logements neufs se fait désormais en suivant des normes environnementales strictes, l’État, propriétaire de quelque 190 000 bâtiments couvrant plus de 94 millions de mètres carrés, souhaite montrer l’exemple en matière de transition écologique.
Son objectif : faire de son parc immobilier un levier efficace pour diminuer son empreinte environnementale et soutenir la dynamique de rénovation énergétique à l’échelle nationale. Par une stratégie alliant sobriété, évolution des usages et travaux de rénovation, l’État compte ainsi accélérer la décarbonation de l’immobilier public et impulser une modernisation en profondeur des pratiques.
Les trois grands leviers de transformation
Pour amorcer une véritable transition écologique dans l’immobilier de l’État, trois axes principaux ont été identifiés et consolidés dans la feuille de route gouvernementale.
- La sobriété immobilière, pour réduire le foncier occupé et limiter l'artificialisation des sols.
- L’optimisation des usages et l’évolution de l’exploitation-maintenance, pour encourager de nouveaux comportements et une gestion plus fine des installations.
- Les travaux de rénovation énergétique à grande échelle, indispensables pour faire baisser drastiquement la consommation d’énergie et les émissions de gaz à effet de serre.
Il s’agit également de responsabiliser toutes les parties prenantes : les agents, les gestionnaires de patrimoine et les organismes prestataires. L’État s’est donc doté d’outils de suivi et de financement, afin de garantir une cohérence nationale et un soutien financier suffisant pour mener à bien ces transformations. Avec ce plan, l’État compte réduire drastiquement l’empreinte carbone, mais aussi renouveler la façon de travailler et d’occuper les espaces publics.
L'enjeu de sobriété immobilière
Afin de rendre l’immobilier de l’État plus vertueux, la première priorité consiste à réduire la superficie des bâtiments administratifs et veiller à limiter l’artificialisation des sols. L’objectif ici est de parvenir à une baisse de 25 % des surfaces de bureaux sur une période de dix ans, avec un palier intermédiaire de 7,5 % à atteindre d’ici 2027. Pour atteindre ces cibles, l’État mise notamment sur une rationalisation des espaces occupés, en adéquation avec les usages réels de chaque service.
Une circulaire dédiée aux « surfaces » guide et contraint les acteurs publics dans cette démarche (16 m² par résident pour les surfaces tertiaires). En pratique, il s’agit d’encourager une meilleure mutualisation des locaux et de privilégier des solutions plus flexibles. Les zones partagées (comme les salles de réunion modulables) ou le télétravail sont de bons exemples.
En outre, des mécanismes de financement conditionnés incitent les gestionnaires à s’engager résolument sur la voie de la sobriété : le versement de certains crédits dépend en effet du respect d’objectifs de réduction de surface et de performance énergétique.
Des mesures qui permettent de faire d’une pierre deux coups :
- Réaliser des économies d’énergie et réduire ses coûts d’exploitation
- Donner l’exemple d’un usage optimisé et responsable du foncier, dans un contexte de vigilance accrue sur l’impact environnemental des aménagements urbains.

Les usages et l’exploitation-maintenance
Les mesures de réduction de consommation
Après l’optimisation des surfaces, la maîtrise des consommations d’énergie passe également par une adaptation des pratiques dans les bâtiments de l’État. Dans ce cadre, un plan gouvernemental de sobriété énergétique prévoit une quinzaine de mesures pour réduire la consommation globale de 40 % à l’horizon 2050. Parmi elles :
- La limitation de la température maximale de chauffe en hiver, fixée à 19°C dans les bureaux la journée, 16°C la nuit et 8°C lors d’une fermeture de plus de 3 jours du bâtiment.
- Un décalage de la période de chauffage de 15 jours au début et à la fin, si les températures extérieures le permettent.
- Une réduction de l'utilisation de l'eau chaude sanitaire dans les bureaux (sauf indispensables comme les douches etc.) quand les conditions le permettent.
Pour encourager ces évolutions de comportement, le concours CUBE (Concours Usages et Bâtiments Efficaces) a été lancé il y a une dizaine d’années par l’Institut français pour la performance du bâtiment (IFPEB). Il incite les agents et les services à innover et à adopter de nouvelles routines, qu’il s’agisse de régler plus finement la température ou de sensibiliser les équipes aux écogestes, le tout via une compétition ludique.
Par exemple, un concours CUBE récent auquel ont participé 685 bâtiments (1,7 km² de SDP) a permis, en deux mois seulement, des économies de 12 % en moyenne et jusqu’à 50 % pour les meilleurs candidats. Cela s’est traduit en 2,4 millions d’euros d’économisés.
L’unité d’élite “exploitation maintenance” pour la sobriété énergétique
Par ailleurs, une « task force exploitation-maintenance » coordonne les actions de terrain : depuis sa création en 2023, elle a déjà initié plus de 1300 prestations couvrant près de 2000 bâtiments, notamment pour optimiser le pilotage technique, remplacer des équipements énergivores ou améliorer les automatismes.
En préconisant des actions sans coût, d’autres à faible coût et quelques travaux pour améliorer l’efficience (installation d’éclairage LED, robinets thermostatiques...), la task force a pu élaborer des centaines de plans d’actions pour optimiser la performance énergétique.
Agir par des travaux de rénovation
Pour parvenir à une réduction importante de la consommation énergétique dans l’immobilier de l’État, des chantiers de rénovation d’envergure ont été engagés, soutenus par un financement colossal. En effet, depuis 2018, ce sont 4,4 milliards d’euros qui ont été investis par l’État dans cette grande opération de rénovation. Au total, on vise un gain d’au moins 1,2 TWh d’économies d’énergie par an, assorti d’une réduction de 239 000 tonnes d’émissions de CO₂.

Ce plan de transition énergétique s’est développé en 4 programmes emblématiques depuis son lancement :
- Le programme de rénovation des cités administratives : lancé en 2018, il concerne 36 sites, avec près d’un milliard d’euros investis.
- Le Plan de relance de septembre 2020 : il a permis de financer pas moins de 4000 projets, pour un montant de 2,7 milliards d’euros.
- Les plans de résilience (2022-2023) : plus récents, ils soutiennent 1900 projets, représentant 1,8 milliard d’euros.
- Le programme 348 (édition 2024) : avec une enveloppe de 500 millions d’euros supplémentaires, ce dispositif table sur 1200 projets de rénovation supplémentaires, pour intensifier encore l’effort de transition énergétique.
En modernisant durablement les bâtiments, l’État agit sur la réduction de sa consommation d’énergie, renforce la performance de ses infrastructures et soutient la filière de la construction et de la rénovation écologiques. Une filière qui est de plus en plus mise à contribution ces dernières années avec les différentes mesures en faveur de l’objectif de neutralité carbone 2050. On pense notamment à l'entrée en vigueur de la RE2020 dans la construction de logements neufs ou encore à l’interdiction de location des passoires thermiques (DPE G+ et G, puis F et E dans quelques années.
Quelques réalisations concrètes pour la transition écologique dans l’immobilier d’État
L’effort de rénovation énergétique dans le parc immobilier étatique donne déjà lieu à des réussites tangibles sur le terrain. Plusieurs chantiers exemplaires illustrent ainsi l’efficacité des moyens déployés :
Les rénovations lourdes du programme 348
À Melun, 71,5 M€ ont été investis pour une rénovation globale des 12 bâtiments du site de la cité administrative, la mise aux normes, et le raccordement à un réseau de chaleur majoritairement alimenté par des énergies renouvelables (86 %), qui doit permettre une économie de 3,66 millions de kWh/an et 666 000 tonnes eq CO₂/an.
À Nice, l’Université Côte d’Azur a entamé un vaste chantier comprenant : isolation thermique, de remplacement de menuiseries et remplacement des éclairages par du LED, avec un gain énergétique estimé de 1,069 million de kWh/an et 307 000 Teq CO₂/an. Le montant du projet s’élève à 9,2 M€.
À La Roche-sur-Yon, un projet de 34,7 M€ de rénovation et densification de la cité administrative a été entrepris. Au programme : rénovation globale et mise aux normes de deux bâtiments, changement du système de chauffage pour une pompe à chaleur sur géothermie. Gains estimés : 1,5 M kWh/an et 293 000 Teq CO₂/an.

Gains énergétiques rapides
L’installation de panneaux photovoltaïques dans certains établissements (par exemple la Bibliothèque universitaire du campus de Fouillole ou le bâtiment de la Police nationale à Caen) favorise à la fois la production d’électricité verte et la baisse des factures énergétiques.
Sur de nombreux sites (Institut Mines-Télécom, Direction Territoriale Nord-Pas-de-Calais, Centre national de la propriété forestière...) ont été entrepris des travaux pour remplacer les chaudières au gaz vieillissantes par des système de chauffages performants (pompes à chaleur, geothermie...) dans le but de créer des économies substantielles en un temps relativement court.
Initiatives menées dans le cadre du concours CUBE
Le défi d’économies d’énergie lancé par ce concours touche aussi bien le Cabinet du préfet de la Charente que la Cour d’appel de Fort-de-France, ou encore le siège des Voies navigables de France à Dole.
Des établissements tels que l’École des Ponts ParisTech se sont également distingués en misant sur le réglage des températures, la modernisation de l’éclairage ou encore l’amélioration des systèmes d’isolation.
Ces exemples démontrent la diversité des approches et la possibilité de combiner optimisations rapides avec des rénovations plus profondes. L’objectif commun : associer efficacité énergétique, réduction des émissions de CO₂ et amélioration du confort des usagers.
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