PLF 2025 : Le régime micro-foncier voit son abattement fiscal passer à 50 %
SOMMAIRE
- Le régime micro-foncier et ses enjeux
- Qu’est-ce que le régime micro-foncier ?
- Un concurrent principal : le régime LMNP
- Une réforme pour contrer la domination des locations meublées
- Origine et adoption de l'amendement
- Objectifs et justifications de la réforme
- Une bonne nouvelle pour les locataires et les propriétaires
- Un impact fiscal maîtrisé
- Des incertitudes persistent cependant...
Le Projet de Loi de Finances 2025 est attendu au tournant par tout le secteur du logement. Une mesure coup de poing a été adoptée le 29 novembre dernier par le Sénat : l'augmentation de l'abattement fiscal du régime micro-foncier, qui passe de 30 % à 50 %. Cette réforme a un objectif : revitaliser un marché en déclin, celui des locations nues, gravement concurrencé par l’essor des meublés touristiques ces dernières années.
En quatre ans, le nombre de logements loués en nu a été réduit de moitié, un phénomène attribué à la popularité croissante des plateformes de location de courte durée. En réponse, le législateur entend rétablir l’équilibre en rendant la location nue fiscalement plus attractive, tant pour les investisseurs que pour les locataires.
Avec un avantage financier revalorisé, cette mesure pourrait marquer un nouveau départ pour un secteur essentiel à la stabilité du marché locatif.
Nous verrons ici les détails de cette réforme, ses implications pour les propriétaires et locataires, ainsi que ses possibles effets sur l’économie du logement en France.
Le régime micro-foncier et ses enjeux
Qu’est-ce que le régime micro-foncier ?
Le régime micro-foncier est une option fiscale destinée aux propriétaires percevant des revenus locatifs annuels inférieurs à 15 000 €. Il simplifie la déclaration des revenus en offrant un abattement forfaitaire sur les loyers perçus, initialement fixé à 30 %.
Ce dispositif permet aux bailleurs de déduire une part des charges liées à la gestion de leurs biens sans avoir à justifier les dépenses réelles. Le reste, soit 70 % des loyers, est ensuite intégré aux revenus imposables et soumis au barème progressif de l'impôt sur le revenu.
Malgré son attractivité administrative, ce régime a perdu en popularité face aux dispositifs dédiés à la location meublée, comme le Loueur en Meublé Non Professionnel (LMNP).
Un concurrent principal : le régime LMNP
Le régime LMNP concerne tous les types de biens loués en meublé, mais est particulièrement prisé dans un but touristique avec les locations meublées de courte durée. En effet, ceux-ci proposent des avantages fiscaux importants.
En Régime micro-BIC (Bénéfices Industriels et Commerciaux), les propriétaires bénéficient d’un abattement de 50 %, bien supérieur à celui du micro-foncier. De plus, le régime réel permet de déduire des amortissements, offrant une réduction importante de la base imposable.
Cet avantage fiscal a poussé de nombreux bailleurs à privilégier l'investissement locatif en meublé, souvent considéré comme plus rentables. En parallèle, la popularité de plateformes comme Airbnb a accentué le déséquilibre entre les locations nues et meublées, contribuant à la raréfaction de l’offre locative classique. Dans certaines villes, ce phénomène a été constaté à outrance.
Saint-Malo par exemple, s’est récemment vue contrainte de limiter drastiquement le nombre de locations courte durée dans la commune. En effet, en seulement un an entre 2018 et 2019, le nombre de meublés touristiques a explosé de +24% et n’a fait qu’augmenter ensuite. La municipalité a donc imposé un quota plafonné à 12,5% des logements intra-muros qui peuvent être destinés à ce type de location. Les Malouins se félicitent d’ailleurs de cette victoire de Saint-Malo face aux Airbnb.
Une réforme pour contrer la domination des locations meublées
Origine et adoption de l'amendement
Face à l’érosion rapide du parc locatif en nu, des propositions d’amendements ont été faites dans le cadre du PLF 2025 à l’Assemblée Nationale avant que le texte soit envoyé au Sénat. Les députés Annaïg le Meur (PS) et Inaki Echaniz (EPR) sont à l’origine de l’amendement n°I-2445 déposé le 18 octobre 2024 et adopté 5 jours après. Le 29 novembre, les sénateurs ont débattu et adopté à leur tour cet amendement essentiel, afin de relancer la dynamique locative en France.
Porté par des députés soucieux de préserver l’équilibre du marché locatif, cet amendement I-2445 fait passer l'abattement forfaitaire du régime micro-foncier de 30 % à 50 %. Cette décision est bien entendu une réaction directe au contexte où les locations meublées (en particulier de courte durée), favorisées par des dispositifs fiscaux avantageux, captent une part croissante du marché qui devraient plutôt revenir aux logements longue durée. Il y a en outre déjà des cas de régulation et d'encadrement des meublés touristiques dans certaines villes.
Lors de l’examen de cet amendement, ses auteurs ont mis en avant plusieurs constats alarmants : en quatre ans, les logements loués nus ont été divisés par deux, et les locataires se tournent vers des options souvent moins stables et plus coûteuses. À l’instar de la baisse de régime des ventes de logements neufs ces deux dernières années, les locations nues traversent une crise à laquelle il faut remédier.
Objectifs et justifications de la réforme
L’amendement adopté vise donc à rendre les locations nues plus compétitives en offrant un avantage fiscal similaire à celui des locations meublées. Cette harmonisation fiscale s’appuie sur plusieurs arguments :
- Renforcer la sécurité des locataires : les baux en location nue, d’une durée minimale de trois ans, offrent davantage de stabilité par rapport aux baux annuels des meublés.
- Encourager des loyers plus abordables : la location nue reste, en moyenne, 10 à 20 % moins chère que son équivalent meublé.
- Répondre à une demande croissante : avec des ménages recherchant des logements stables et accessibles, relancer l’attractivité du marché nu devient une priorité.
Une bonne nouvelle pour les locataires et les propriétaires
L’augmentation de l’abattement fiscal à 50 % rend bien évidemment la location nue nettement plus attrayante pour les investisseurs. Cette mesure est peut-être le coup de pouce qu’il manquait pour relancer l’intérêt pour ce type de bail, notamment parmi les propriétaires hésitant encore entre location nue et meublée.
Avec cet abattement, la rentabilité des loyers perçus en nu se rapproche de celle des meublés, tout en maintenant une gestion administrative plus simple.
En outre, cette réforme pourrait encourager les propriétaires à investir ou à réinvestir dans des logements destinés à la location nue, rééquilibrant un marché dominé par les meublés touristiques dans certaines villes. Cette orientation contribuerait à diversifier les opportunités pour les investisseurs, tout en leur offrant une option sécurisée sur le long terme.
Avec davantage de logements proposés en nu, les locataires bénéficieront de baux plus stables, généralement fixés sur une durée minimale de trois ans, offrant une sécurité locative accrue. Par ailleurs, les loyers dans ce segment étant inférieurs à ceux des logements meublés, l’accès au logement deviendrait plus abordable pour les ménages à revenus modestes ou intermédiaires.
La mesure contre la pression exercée par les meublés touristiques sur les prix du marché locatif. En rendant la location nue fiscalement attractive, l'idée est de rediriger une partie de l’offre actuelle vers des usages résidentiels pérennes, au bénéfice des familles et des individus en quête de logements stables.
Un impact fiscal maîtrisé
Sur le plan fiscal, le coût de cette réforme est limité grâce à un mécanisme de compensation. La réduction des abattements applicables aux locations meublées touristiques (qui passent de 50% à 30%, et 40% pour les meublés à baux longue durée) dans le cadre du régime micro-BIC permettra de financer cette mesure sans peser davantage sur les finances publiques.
Cette réduction de l’abattement fiscal prévue pour les locations meublées pourrait bien entendu pénaliser certains investisseurs, en particulier ceux opérant dans les zones touristiques. Il faut cependant garder à l’esprit que l’avantage de cette niche était jusqu’ici considérable comparé aux locations nues et que la mesure constitue un rééquilibrage plus qu’une pénalisation.
Toutefois, des exceptions ont été évoquées pour protéger certains biens qualifiés d’essentiels dans ce contexte difficile : les résidences de tourisme, résidences séniors, résidences étudiantes et autre établissement pour personnes âgées ou handicapées bénéficieront vraisemblablement de dérogations.
Il est mentionné dans l’amendement I-2445 que la compensation des pertes de recettes pour l’État se fera également par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre 1er du livre III du code des impositions sur les biens et services
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Des incertitudes persistent cependant...
Le chemin législatif de cette réforme est toutefois encore semé d’incertitudes. Légalement, après son adoption par le Sénat, une mesure doit être validée en commission mixte paritaire (CMP), où 7 députés et 7 sénateurs s’accordent sur une version finale. Cependant, le gouvernement peut décider de recourir à l’article 49.3 de la Constitution pour faire adopter le texte sans vote, au risque de déclencher une motion de censure.
À l’heure où nous écrivons ces lignes, c’est exactement ce qui s’est produit hier : le Premier Ministre Michel Barnier a déclenché l’article 49.3 afin de faire passer en force le volet Sécurité Sociale du Budget 2025. S'ensuivirent deux motions de censure qui ont été déposées respectivement par le NFP et le Rassemblement National.
Les tensions politiques laissent donc planer des doutes quant à la pérennité de cette réforme. Les compromis nécessaires entre les différentes sensibilités politiques pourraient affaiblir certaines dispositions ou retarder leur mise en œuvre.
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